La 18ème Conférence des Parties pour la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) vient de se terminer à Genève (Suisse) au centre international des conférences de Palexpo. Les événements ont eu lieu du 17 au 28 août et ce fut une expérience incroyable.
La CITES est un accord mondial qui protège plus de 35.000 espèces végétales et animales menacées contre le commerce international illégal. Les Parties à la convention se réunissent tous les 3 ans pour revoir leurs actions et leurs plans et recevoir des propositions pour inscrire sur la liste ou retirer de la liste diverses espèces et se prononcer par un vote. En tant que jeune diplômée ayant récemment terminé un programme exhaustif sur la gestion des espèces sauvages dans le cadre du cours de master de la CITES à l’Université d’Andalousie en Espagne, j’étais curieuse et j’ai eu envie de voir de plus près comment les pays et toutes les parties prenantes interagissaient pour prendre des décisions liées au commerce des espèces menacées.
Le premier jour, j’ai assisté à un événement parallèle sur le PROJET HIPPOCAMPE, soutenu par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et la Commission de la sauvegarde des espèces (CSE). Il était intéressant d’apprendre que les hippocampes ont été les premiers poissons marins inscrits sur la liste de l’Annexe II de la CITES en 2002. L’objectif était d’encourager un commerce durable, légal et réglementé des hippocampes. Les personnes présentes ont plaidé en faveur d’un soutien pour le renforcement des capacités et des systèmes de surveillance efficaces. Elles ont également donné une vue d’ensemble et expliqué comment mener un avis de commerce non préjudiciable (NDF) pour les hippocampes, et étaient prêtes à aider les pays à organiser ce NDF. Ce sujet m’a certainement intéressée car mon pays a des difficultés pour surveiller le commerce des hippocampes. Il existe une boîte à outils avec beaucoup de ressources et d’informations, susceptible d’aider les Parties de la CITES à mettre en œuvre la liste de l’Annexe II sur les hippocampes afin de veiller à ce que la population des hippocampes sauvages ne diminue pas davantage. Vous pouvez vous informer ici : www.iucn-seahorse.org/cites-toolkit.

L’intensité des nombreux événements parallèles et les réunions de comité avec des groupes d’intérêt variés et divers pays ont été très convaincantes. J’ai pu observer les Parties et leurs alliés recourir à diverses tactiques de pression pour obtenir des appuis pour leurs programmes ou leurs propositions. Le lobbying n’était pas uniquement basé sur des faits scientifiques. Il concernait aussi des partenariats stratégiques et des représentations par les Parties proposantes, des choses que j’avais appris pendant le programme de master. La présentation des données et la narration d’histoires convaincantes sur le statut de la gestion des espèces avaient une influence considérable sur le soutien dans tous les événements. J’ai constaté que des consultations avant la COP avec d’autres Parties, en particulier avec des États de l’aire de répartition, étaient indispensables pour mobiliser le soutien en faveur de la protection des espèces aux Annexes I & II. Par exemple, lorsque la proposition du Costa Rica visant à inscrire sur la liste de l’Annexe II les grenouilles de verre (Hyalinobatrachium spp., Centrolene spp., Cochranella spp. et Sachatamia spp.) n’a pas été soutenue par la Guyane et quelques États-membres de l’Union européenne. Ne pas faire participer les États de l’aire de répartition et d’autres Parties stratégiques comme l’UE lors d’une consultation adéquate ou une collaboration sur des NDF a été le coup de grâce pour cette proposition du Costa Rica. La Guyane a fait remarquer que le Costa Rica ne l’avait pas consultée alors qu’elle est un pays de l’aire de répartition majeur et l’UE n’était pas convaincue du fait que le Costa Rica ait des preuves scientifiques suffisantes en appui de sa proposition. C’était une bonne leçon pour la coordination sous-régionale et l’échange d’informations entre les groupes de parties prenantes, indiquant la nécessité d’améliorer la qualité des données et de susciter des appuis pour la protection des espèces.
Durant la 13ème édition d’un cours de master de la CITES, nous avions représenté des événements et des sessions COP pour simuler la façon dont les décisions étaient prises. Le programme de master nous avait donné une idée des activités de la COP, mais l’intensité et la complexité de la véritable conférence ont été une extraordinaire expérience. Les propositions de Parties qui ne s’étaient pas bien préparées avant la COP ont été pénalisées de ce fait. Une chose que j’ignorais avant la conférence. Le programme de maîtrise portait davantage sur la biodiversité, la réduction du commerce des espèces, les mécanismes pour découvrir le trafic illégal des espèces, les NDF indispensables pour le suivi et l’évaluation de la CITES et d’autres sujets dans le même sens.
Plusieurs diplômés du programme de master d’Afrique de l’Ouest étaient venus à la COP18 de la CITES pour montrer leurs travaux de recherche et participer à des sessions de comité et à des événements parallèles. Quatre d’entre eux ont été promus points focaux de l’Organe de gestion de la CITES pour leur propre pays après l’obtention de leur diplôme. Ils se sont exprimés très librement lors de la revue de documents et les sessions de proposition et ont aussi pris part au lobbying des Parties lors d’événements parallèles qui ont abouti au soutien ultérieur en faveur des propositions concernant les girafes et des espèces de vautours afin de les inscrire sur la liste de l’Annexe II. Les contributions de l’Afrique de l’Ouest à la COP18 ont fait l’objet de louanges et ont été jugées parmi les meilleures des récentes COP — ce qui m’a rendue très fière en tant qu’écologiste et ouest-africaine.

Par Yatta H. Kamara
Responsable des zones humides et de l’écosystème marin
Autorité nationale des aires protégées (NPAA)
Sierra Leone