Par Zebedee Njisuh, Gestionnaire de Paysage du WA BiCC
L’exercice récent de cartographie sur le terrain de l’Estuaire du fleuve Sherbro (SRE) était une indication de la nouvelle approche à la cartographie sur le terrain en Sierra Leone ; une approche qui reconnaît les membres communautaires en tant qu’importantes parties prenantes pour la durabilité environnementale.
L’activité de cartographie est un effort collaboratif entre le programme pour la Biodiversité et le Changement Climatique en Afrique de l’Ouest (WA BiCC) de l’USAID, les communautés locales et les diverses parties prenantes gouvernementales pour maintenir la riche diversité de la Sierra Leone et du SRE. Samuel Ibrahim Kobah, responsable du suivi et de l’évaluation auprès de l’Autorité nationale des aires protégées et le Conservation Trust Fund de Sierra Leone (NPAA/CTF), a parlé de son expérience avec l’initiative : « C’est la première fois que je vois ce genre de collaboration dans la cartographie d’une aire protégée en Sierra Leone ».
Les habitants de la zone marine protégée et le gouvernement de la Sierra Leone ont salué cette approche, puisqu’elle permettra aux principales parties prenantes de gérer et de maintenir le paysage côtier. La cartographie sur le terrain porte sur la collecte et le traitement de données qui permettront de bien comprendre la distribution spatiale des mangroves et les autres systèmes d’utilisation des terres côtières et de la couverture végétale dans le SRE.
L’exercice de cartographie faisait partie du processus d’élaboration d’un plan de cogestion pour la région côtière qui, avec la présence abondante de mangroves le long des rivières et des chenaux de marée, représente un des hotspots de biodiversité en Sierra Leone. Outre leur rôle important dans les moyens d’existence des habitants du littoral, les mangroves tiennent également lieu de sites de reproduction pour les poissons et protègent les communautés côtières des inondations et de l’érosion. En dépit de leur importance indéniable, les mangroves subissent une menace de destruction croissante.
Avantages de l’exercice de cartographie
Avant l’exercice de cartographie sur le terrain, les membres communautaires avaient suivi une formation sur les règles de base pour la manipulation et l’utilisation des outils de cartographie, notamment l’unité du système de positionnement global (GPS).

« Cette formation sur les systèmes d’information géographique (SIG) m’a fait connaître l’utilisation du GPS de Trimble, et [m’a appris comment] faire la distinction entre les systèmes de gestion de l’information et le SIG », a déclaré Kobah.
En Sierra Leone, les cartes sont réalisées habituellement par des agences gouvernementales avec peu, voire pas du tout de participation des communautés des alentours. Cet exercice de cartographie a donné l’occasion aux membres communautaires formés de participer à l’orientation du groupe de cartographie sur le terrain. Ce processus a favorisé une meilleure compréhension du district existant, de la chefferie et des limites communautaires dans la région.
« Avant d’aller sur le terrain, je pouvais seulement imaginer les choses », a dit James A.S Lahai, chef suprême par intérim de la chefferie de Bagruwa. « Mais après cet exercice, je peux dire que j’ai une meilleure idée des limites sur le terrain de la chefferie de Bagruwa ».
Kobah était du même avis. « Je travaille avec NPAA/CTF depuis quatre ans. Participer à la cartographie sur le terrain du SRE a été pour moi la première occasion de comprendre la différence entre les limites de la chefferie et celles du district. Je comprends mieux maintenant la disposition et la distribution de l’Estuaire du fleuve Sherbro ».

Les participants à l’exercice de cartographie ont également appris la signification de la durabilité environnementale dans la région et ont observé des conflits liés aux ressources, ce qui leur a permis de mieux comprendre l’importance des activités de conservation de WA BiCC.
C’était certainement le cas pour Yaya Fofana de Yargoi.
« Tout au long de cet exercice de cartographie, j’ai pu voir que de grandes étendues de mangroves avaient été détruites dans la communauté de Senjehou par des gens de Bendu Cha (chefferie), car ces derniers avaient épuisé leurs ressources de mangrove, » a-t-il expliqué. « Ce pourrait devenir une source de conflit, si rien n’est fait ».
De même, selon Munda Beah, un conseiller du conseil municipal de Bonthe, il a appris que les gens récoltaient et défrichaient sans distinction du bois de mangrove dans l’estuaire, grâce à l’exercice de cartographie
D’après les commentaires de membres communautaires, le processus de cartographie a également été bénéfique au renforcement des capacités et au développement personnel.
« Avec les connaissances tirées de la formation et du travail de terrain, je vais pouvoir solliciter un emploi dans un projet similaire qui se présente dans la chefferie », dit Lahai. Il a ajouté qu’il utiliserait ces connaissances pour analyser les propositions soumises au conseil du village sur l’extraction minière dans la chefferie.
Perspective d’avenir : Planifier pour la durabilité
Kobah a dit que les cartes produites du fait de l’exercice étaient des ressources très utiles à son institution pour la gestion de SRE.
« J’ai réalisé que le SRE est l’estuaire le plus riche de la Sierra Leone en termes d’abondance de la diversité. Se basant sur ces connaissances, dans l’avenir, la NPAA pourra mieux guider les chercheurs dans le SRE et développer des projets concernant les espèces menacées et menacées d’extinction », a-t-il dit. « Avant cet exercice, nous avions refusé des projets d’études d’institutions étrangères souhaitant faire des recherches sur les lamantins et les poissons-scies ».

La prochaine activité en vue d’élaborer le plan de cogestion pour le SRE est l’évaluation rurale participative (ERP). L’ERP est une réunion consultative avec les membres communautaires dans la région côtière dans le but de leur donner le pouvoir et les habiliter à se faire entendre sur la stratégie de gestion des zones humides dotées d’une riche biodiversité.
Même si le processus de cartographie est loin d’être parfait (il aurait pu inclure des femmes et des jeunes, par exemple), l’opinion générale a estimé que l’exercice aiderait les individus à améliorer leurs moyens d’existence et à contribuer à la préservation de la biodiversité unique du SRE.