Promenez-vous le long de la côte de Sierra Leone et vous finirez peut-être par fouler autre chose que la terre. Ici, sur la côte occidentale de l’Afrique, des tas de coquilles d’huîtres vides traînent dans les rues et dans les cours des habitations des villages ruraux. Ces produits dérivés de l’ostréiculture, coupants et pointus, encombraient les lieux et posaient des risques sanitaires– jusqu’à maintenant.
Pour nombre de ménages vivant sur la côte de Sierra Leone, la vente de la chair des huîtres représente une source de revenu capitale, souvent dans les régions rurales, pauvres. Ce sont principalement les femmes qui récoltent cette riche source de protéine, avec parfois l’aide de leurs enfants et de leurs maris. Bien que ces coquilles soient prisées ailleurs pour leur utilisation en céramique et pour d’autres formes d’artisanat, en Sierra Leone, en raison du manque de moyens pour les traiter, elles sont rejetées et s’accumulent en tas de déchets. Leurs bords coupants peuvent causer des blessures physiques ou créer un habitat de reproduction de bactéries pathogènes et de moustiques.
Pour autant, dans certains villages côtiers, les coquilles d’huîtres ne sont plus considérées comme des déchets. Les habitants des communautés de Kortimoh et de Momayah, au sud, donnent désormais une nouvelle vie à ces coquilles solides, riches en calcium : la protection contre les impacts du changement climatique.
Le besoin d’améliorer l’infrastructure côtière avait été souligné dans les observations de l’Évaluation de vulnérabilité au changement climatique menée par le programme pour la Biodiversité et le Changement Climatique en Afrique de l’Ouest (WA BiCC). Afin de concevoir une infrastructure abordable et pouvant être reproduite, il était essentiel de rechercher des matériaux bon marché et disponibles localement.
Après avoir dirigé des évaluations sur le terrain et organisé des réunions de consultation avec les habitants de Kortimoh et de Momaya, WA BiCC a conçu un remblai susceptible d’accroître la résilience au changement climatique en réduisant l’érosion, en atténuant l’impact de l’élévation du niveau de la mer et des ondes de tempête, et en accélérant la réhabilitation et la croissance de la mangrove. Parmi les matériaux locaux disponibles envisagés, seules les coquilles d’huîtres jouaient deux rôles à la fois : empêcher les inondations en laissant drainer librement l’eau entre elles, et renforcer le littoral quand il est composé d’une mixture de sable et de terre. L’inspiration pour ce concept se retrouve dans certaines fonctions écologiques clés de l’huître, dans son habitat ; la présence de coquilles d’huîtres crée un fond dur qui stabilise les sédiments et évite aussi l’érosion par les courants et les vagues.
La structure est maintenant prête à protéger 5.200 personnes des deux communautés du littoral de Sierra Leone. Les membres des communautés ont été formés sur la façon de construire les remblais afin de reproduire la structure dans des communautés connaissant la même vulnérabilité.
Et la cerise sur le gâteau : tout le monde peut continuer à manger des huîtres comme avant !
