Alors que l’élévation des niveaux de la mer menace les côtes ouest-africaines, les petites comme les grandes communautés envisagent la restauration des mangroves comme mesure essentielle de protection. Cependant, la mise en œuvre d’une pépinière de mangrove requiert trois à six mois de participation communautaire assidue, incluant temps et main d’œuvre, et trouver le temps et l’énergie suffisants peut s’avérer difficile lorsque l’on considère les autres contraintes que connaissent les membres des communautés.
C’est pourquoi la communauté de Gbongboma se démarque nettement des autres. Parmi les 24 communautés avec lesquelles le Programme pour la Biodiversité et le Changement Climatique (WA BiCC) travaillent sur la côte de la Sierra Leone dans le cadre de la restauration des zones de mangrove dégradées, Gbongboma s’est révélée être la plus novatrice et déterminée lorsqu’il s’agit de la restauration de la mangrove. Non seulement ses membres ont atteint leurs objectifs, mais ils les ont même dépassés !
Gbongboma est une petite communauté rurale d’environ 90 habitants, qui dépend largement de l’agriculture vivrière, de la pêche et de la récolte et de la vente des huîtres pour joindre les deux bouts. Après deux ans d’engagement avec WA BiCC, les membres de la communauté de Gbongboma, située dans l’Estuaire du fleuve Sherbro, avaient rempli l’objectif qu’ils s’étaient fixé, soit de restaurer 0,55 hectares d’une zone dégradée dans leur communauté.
Ayant atteint leur premier résultat plus tôt que prévu, le Comité de restauration et son Président décidèrent de remettre en état un autre site comprenant 1,15 ha de mangroves dégradées, pour un total de 1,8 ha de forêt restaurée, plus du double du premier objectif. Pour accroître le nombre de plantules d’espèces de mangrove nécessaires à la restauration de ce site élargi, la communauté a eu recours à des sacs en polyéthylène fournis au début de l’activité de formation pour la restauration, et les membres du Comité de restauration de la mangrove ont même eu l’idée d’utiliser des sachets d’eau minérale, vides, pour y faire pousser les plantules. Cette approche adaptative pour respecter leurs engagements dans le cadre de l’expansion de la restauration a permis à WA BiCC de tirer un enseignement – le recours à des nouveaux matériaux comme ces sachets en plastique usagés pour y mettre les plantules, réduisant ainsi la présence de plastique dans la communauté. L’approche avait aussi l’avantage d’exposer l’environnement à moins de plastique et d’éliminer les sacs en polyéthylène qui auraient pu contribuer à la pollution marine. Avec une assistance extérieure limitée, les membres du Comité de restauration de la mangrove de Gbongboma ont établi, entretenu et étendu la pépinière, accroissant ainsi le nombre de plantules transplantées dans les zones dégradées.

Avant que les travaux de restauration ne commencent, quinze membres du Comité reçurent une formation de WA BiCC pour apprendre à identifier les différentes essences de peuplements des mangroves et à établir et entretenir des pépinières. Même si cette formation technique était importante pour l’installation réussie des pépinières au moment du lancement, les connaissances locales ont été capitales dans les initiatives d’expansion. Lorsque l’équipe WA BiCC est retournée sur place pour évaluer le site agrandi, elle a trouvé que le savoir de la communauté en matière d’écologie, d’hydrologie et de sédiments de la région leur avait permis de planifier parfaitement la restauration de la mangrove, ce qui souligne la nécessité absolue de comprendre la masse de connaissances et de savoir-faire au niveau local lorsque l’on travaille en partenariat avec des communautés locales, que ce soit pour la restauration de la mangrove ou d’autres initiatives.
Appréhender ce qui a incité cette communauté à participer de manière si efficace au point de dépasser ses objectifs dans le cadre de cette restauration pourrait donner une idée sur la manière possible de motiver les communautés voisines. Quels sont les facteurs qui ont contribué à cette réussite ? Selon Musa Lahai, le Président du Comité de restauration, la motivation de la communauté de Gbongboma de poursuivre la restauration provenait du fait qu’elle avait constaté les impacts environnementaux négatifs qui suivaient la dégradation de leurs forêts de mangrove. La communauté a su faire le lien entre l’érosion rapide de leurs routes et la destruction de leurs ponts avec la coupe des mangroves pour le bois de chauffe et la récolte des huîtres.

« (Nous) avons pris la décision collective de la restaurer pour éviter une plus grande dégradation, » dit le Président. « Nous avons agi ainsi sans penser à quelque compensation qu’il soit parce que nous savions que c’était pour le bien de notre communauté ».
La décision des membres de la communauté d’étendre indépendamment le projet est un signe encourageant, prouvant que Gbongboma sera plus résiliente à l’avenir – et elle aura d’importantes leçons à communiquer à ses communautés voisines et bien d’autres.