Quand la Passion est Contagieuse – Apprendre à Connaître Felix Olusola Abayomi, Garde Forestier, Lauréat du Prix Paradise Ranger de 2018

Quand la Passion est Contagieuse – Apprendre à Connaître Felix Olusola Abayomi, Garde Forestier, Lauréat du Prix Paradise Ranger de 2018
June 13, 2018 11:50 am Blog

Je vous présente Felix Olusola Abayomi, spécialiste en matière de conservation de la faune basé au Nigeria, fondateur de l’Initiative Wildlife of Africa Conservation (Initiative en faveur de la conservation de la faune d’Afrique), l’un des six lauréats ouest-africains du prix Paradise Ranger Award de 2018, et l’un des défenseurs de la faune parmi les plus passionnés et les plus engagés que vous pourriez rencontrer aujourd’hui. La première fois que j’ai découvert quelque chose au sujet de Felix, un ancien responsable des poissons du Nigeria, c’était en lisant un article dans nos mises à jour internes, qui traitait de son achèvement récent du programme de maîtrise de Gestion et conservation des espèces faisant l’objet de commerce en Andalousie (Espagne), financé par le projet WA BiCC. J’ai appris en même temps qu’il faisait aussi du travail bénévole dans le cadre du Projet Barbados Sea Turtle (Tortues marines dans la Barbade).

J’ai eu la chance de rencontrer Felix en personne en mars 2018, alors qu’il était venu au Ghana pour assister à la toute première Conférence nationale sur les tortues marines. L’idée m’est alors venue de partager son édifiante histoire de conservation et d’approfondir un peu les sources de sa propre inspiration. Après avoir obtenu sa maîtrise et exercé des activités bénévoles, Felix décida de revenir dans sa région et de s’installer dans une communauté à quelque 15 km de son ancienne demeure sur la côte nigériane. Dans ce lieu, un regroupement de villages pauvres dépendant de la pêche, il a découvert la complexité des relations de sa communauté avec les tortues marines, concernant les pêcheurs, la jeunesse pauvre et l’accès aux services de santé.

Il m’a raconté que lorsque les pêcheurs de son village lançaient leurs filets dans l’océan, ils attrapaient souvent des tortues marines. À cette occasion, les animaux abîment les filets et il faut du temps et de l’argent pour les réparer. Les pêcheurs, qui ont besoin d’argent pour réparer leurs filets, vendent les tortues marines à d’autres membres de la communauté qui en consomment la viande et extraient l’huile de la carapace.

La diminution des stocks de poissons le long de la côte a également limité les possibilités économiques des jeunes, et nombre d’entre eux se sont tournés vers le braconnage ou la chasse aux tortues marines, dans la perspective de gains à court terme.

Enfin, Felix m’a parlé d’une visite qu’il avait faite dans un village, visite au cours de laquelle il était tombé par hasard sur une femme qui cuisinait quelque chose de bizarre. Il s’était approché et avait découvert qu’il s’agissait de la carapace d’une tortue luth. Curieux, comme il n’avait jamais vu ou entendu parler d’une telle pratique, il demanda à la femme ce qu’elle allait faire avec la carapace. Elle lui expliqua que c’était une habitude dans le village de cuire la carapace pour en extraire l’huile, qui servait ensuite à soigner la toux chez les enfants. Felix, était déçu, mais pas surpris, compte tenu que la majorité des gens ne peuvent pas se permettre des soins de santé, même les plus élémentaires.

Dans ces trois cas, (et Felix a encore bien d’autres histoires à raconter), Felix reconnaissait que le problème était beaucoup plus étendu qu’il ne l’avait supposé au départ, mais il insistait également, disant que la pauvreté était à l’origine de l’enchaînement de ces événements. Au lieu de le décourager, ces défis l’ont motivé à travailler avec les membres de la communauté pour trouver une solution au problème. Pour remédier à la situation, lui-même et l’équipe de l’ONG qu’il a créée, Wildlife of Africa Conservation Initiative, ont proposé de payer les factures médicales de tous les enfants de moins cinq ans et les ont inscrits dans un hôpital qui prendra soin de leurs problèmes de santé, depuis la toux jusqu’au paludisme, s’ils acceptaient de ne plus utiliser les carapaces de tortue.

Le financement de ces activités pose un problème considérable, mais cette question n’a jamais nui à sa motivation, ni diminuer sa volonté implacable.

Le travail de Felix avec les tortues marines et les communautés du Nigeria n’est qu’un petit élément parmi les nombreuses histoires qu’il m’a racontées. Il a également œuvré à la protection des éléphants et des vautours au Nigeria. Il communique sa passion à l’aide de formation qu’il propose à des ONG locales, des agents gouvernementaux de l’État de Lagos, des responsables du ministère de l’Environnement, des communautés locales et des officiers de l’armée nigériane. Il se sent aussi responsable de l’éducation de la prochaine génération de défenseurs de la faune, il n’est donc pas inhabituel de rencontrer souvent Felix emmenant les écoliers dans des excursions scolaires passionnantes et lors de programmes de formation.

Felix estime que son travail au Nigeria a du sens, et considère qu’il pourrait étendre ses efforts en dehors des frontières nationales et œuvrer avec des personnes dans des domaines semblables en échangeant des idées et en travaillant efficacement. Il a conclu des partenariats locaux et internationaux avec des organisations comme Aktionsgemeinschaft Artenschutz (AGA) en Allemagne ; Waterkeeper Alliance, Global March for Elephants and Wildlife Conservation Film Festival (WCFF), toutes aux États-Unis ; RASTOMA, l’Initiative de conservation des tortues marines et d’autres acteurs de la conservation des tortues marines en Afrique de l’Est et centrale ; ainsi que le projet de Conservation des vautours (VULPRO) en Afrique du Sud.

Au cours de sa visite au Ghana, Felix a partagé son vaste travail sur la conservation des tortues marines avec d’autres défenseurs des tortues participant à la conférence, et a même pris des dispositions supplémentaires visant à établir un réseau régional de conservation des tortues marines dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, car il est persuadé de l’inefficacité des efforts isolés pour la conservation des espèces migratoires, dont les tortues marines. Felix et les principaux défenseurs de la faune ayant participé à cette conférence s’attachent actuellement à faire de ce rêve d’un réseau régional une réalité.

À cause de ses efforts inlassables, Felix Abayomi a reçu récemment le prix Paradise Ranger Award, une subvention de 3.000 USD présentée chaque année à 50 gardes forestiers et défenseurs africains de la faune. Felix avait été recommandé pour ce prix par la Waterkeeper Alliance. La Waterkeeper Alliance, ou l’alliance des gardiens de l’eau, regroupe plus de 300 organisations qui s’efforcent de maintenir la propreté, la sécurité et l’utilisation des plans d’eau destinés à plusieurs communautés à travers le monde. C’est le mouvement écologique local qui se développe le plus rapidement dans le monde, s’étendant sur les six continents.